Il y a quelques mois j’ai découvert le dernier album de Grand Corps Malade. Tradition fraternelle oblige, j’aime d’office ce qu’il fait mais là j’ai trouvé son idée géniale. Il a demandé à plusieurs artistes, comme Richard Bohringer, Charles Aznavour, Luciole et beaucoup d’autres d’écrire une chanson qui intégrerait cette phrase : « Il nous restera ça ». C’est d’ailleurs le titre de l’album !
En bonne littéraire, je suis assez fan des exercices de style de ce genre et ce que j’ai beaucoup aimé ici, c’est la richesse des thèmes abordés autour de cette seule phrase. Bohringer parle d’un amour, Aznavour de l’écriture et Grand Corps Malade de la construction d’une famille. J’avoue, j’y ai pioché quelques textes pour illustrer une cérémonie laïque et j’avais envie d’en partager un avec vous. Celui de Jeanne Cherhal. Il s’intitule « Quand nous aurons cent ans », ce texte peut aussi bien être lu pendant une cérémonie d’engagement (mariage ou PACS) ou lors d’un renouvellement de vœux. Je vous laisse découvrir et me donner votre avis dans les commentaires.
Quand nous aurons cent ans et cent jours et cent nuits
Que nos petits-enfants auront fait des petits
Quand nos bras d’allumettes s’effriteront d’un coup
Que le poids de nos têtes écrasera nos cous
Que nous restera-t-il pour finir en beauté ?Quand nous aurons cent ans et de beaux souvenirs
De nos corps s’aimantant comme deux gouttes de cire
Quand la moindre caresse aura l’air d’un cent mètres
Et que la vieille maîtresse aura perdu son maître
Que nous restera-t-il pour finir en beauté ?Quand nous aurons cent ans dans nos cœurs de sauvages
Dans nos yeux presque blancs nos cheveux de passage
Quand nos cils tomberont comme un arbre à hélices
Que nos jambes n’auront jamais été si lissesQuand nous auront cent ans et la révolte sèche
Que l’inertie des temps aura brisé nos flèches
Quand la fatalité nous fera dire: tant pis
Et qu’un point de côté nous mettra au tapisQuand nous aurons cent ans de regards en arrière
Quand ce qui nous attend sera déjà derrière
Quand revenus de tout et dépassés par tous
Nous attendrons surtout une sortie très douce
Que nous restera-t-il pour finir en beauté ?Il nous restera ça: ton rire qui se faufile
Étincelant, immédiat, entre mes mots futiles
Mon rire qui prend sa source à ton esprit fissa!
J’espère qu’en bout de course, il nous restera ça.
Jeanne Cherhal, « Quand nous aurons cent ans » sur l’album Il nous restera ça de Grand Corps Malade, 2015.