L’amour par Rainer Maria Rilke
Dans sa Lettre à un jeune poète, Rilke s’attarde sur l’aspect difficile de l’amour. C’est beau l’amour, c’est souvent de l’ordre d’une évidence et pourtant c’est aussi difficile. L’amour, c’est une haute exigence ça s’apprend et ça permet de s’apprendre soi-même. Qu’en dites-vous pour une lecture lors de votre cérémonie ?
Il est bon aussi d’aimer ; car l’amour est difficile. L’amour d’un être humain pour un autre, c’est peut-être l’épreuve la plus difficile pour chacun de nous, c’est le plus haut témoignage de nous-même ; l’œuvre suprême dont toutes les autres ne sont que les préparations.
C’est pour cela que les être jeunes, neufs en toutes choses, ne savent pas encore aimer ; ils doivent apprendre. De toutes les forces de leur être, concentrées dans leur cœur qui bat anxieux et solitaire, ils apprennent à aimer. Tout apprentissage est un temps de clôture. Ainsi pour celui qui aime, l’amour n’est longtemps, et jusqu’au large de la vie, que solitude, solitude toujours plus intense et plus profonde.
L’amour ce n’est pas dès l’abord se donner, s’unir à un autre. (Que serait l’union de deux êtres encore imprécis, inachevés, dépendants ?) L’amour, c’est l’occasion unique de mûrir, de prendre forme, de devenir soi-même un monde pour l’amour de l’être aimé. C’est une haute exigence, une ambition sans limite, qui fait de celui qui aime un élu qu’appelle le large.
Rainer Maria Rilke, Lettre à un jeune poète